Donneur d'Organe
Vers
un nouveau musée de la photographie à Lyon
JEUNE CHEF D'ENTREPRISE
ET COLLECTIONNEUR, Thierry Ehrmann fonde le projet d'un nouveau musée
d'art contemporain privé dans la deuxième ville de France.
Un projet dont la réalisation paraît imminente et dans lequel
la photographie tiendrait une place prépondérante.
Le projet paraît
à peine croyable tant il est ambitieux. Lyon s'apprêterait
à accueillir un musée d'art contemporain, entièrement
privé, où la photographie occuperait une place centrale.
L'Organe, c'est son nom, devrait ouvrir ses portes fin 2002 ou début
2003. C'est du moins ce qu'affirme son promoteur, Thierry Ehrmann.
Les cheveux courts, une petite natte façon " Confucius "
posée entre les omoplates, un habit entièrement noir, cet
homme de 39 ans a des allures de Faust. N'y cherchez pas l'artiste ou
le conservateur, cette figure lyonnaise déroutante n'est qu'un
chef d'entreprise, l'une des plus belles réussites locales. En
moins de vingt ans, il a bâti le groupe Serveur, un ensemble de
treize entreprises qui se valorise un petit milliard de francs. La plus
fameuse c'est Artprice.com, le leader mondial des bases de données
d'informations sur les prix du marché de l'art.
Et c'est peut-être du côté de cette jeune pousse qui
collecte l'ensemble des adjudications d'objets d'art qu'il faut creuser
pour percer les ambitions de Thierry Ehrmann. Bases de données,
nouvelles technologies de l'information et art sont les fondements inaliénables
du parcours de ce prince de la net-économie. Avec l'Organe, il
espère ainsi promouvoir toutes les formes d'art issues de ces nouvelles
technologies, la rencontre de l'artiste et du virtuel. Les images occuperont
donc une place de choix. Dans un premier temps, il n'hésitait pas
à évoquer un musée de la photo et de l'image numérique.
Il préfère aujourd'hui parler d'art contemporain.
Art, artistes et objets, les mots se bousculent lorsqu'il se perd dans
ses souvenirs. Thierry Ehrmann touche à tout - il a écrit
un ouvrage sur la psychiatrie --, c'est un collectionneur invétéré
attaché à faire partager ses passions. A plusieurs reprises,
ce boulimique s'est offert des uvres qu'il a tenu ensuite à
donner au musée d'art contemporain de sa ville. Via Artprice, c'est
également l'un des principaux partenaires privés de la Biennale
de la capitale des Gaulles.
L'Organe se place comme une nouvelle étape de cet engagement. Et
de loin la plus ambitieuse. Car derrière la promotion d'uvres
artistiques, Thierry Ehrmann espère également démontrer
que l'on peut gérer un musée autrement. " Un musée
doit avoir les moyens financiers d'acheter ce qu'il y a de mieux dans
tel ou tel domaine pour l'offrir au public. Sans argent, il se contente
d'uvres mineures. Des millions de francs sont souvent nécessaires
pour que ces institutions s'offrent des pièces d'exception. La
même contrainte pèsera sur l'Organe. Alors nous innoverons
et nous n'hésiterons pas à vendre certaines uvres
pour en acheter d'autres de première importance, comme le font
certaines institutions américaines ", assène le promoteur
du projet.
Il réfléchit également au développement d'une
cellule de recherche scientifique au sein du musée commercialisant
ses travaux. Il parie également sur l'exploitation de droits d'image
et de bases de données. L'Organe devrait ainsi commander des uvres
à des artistes qui seront ensuite exposées. Et certaines
seront ensuite acquises par le musée pour constituer le fonds.
Après trois ans, Thierry Ehrmann estime pouvoir arriver à
l'équilibre d'exploitation
D'ici là, il faudra faire sortir de terre cet ambitieux projet.
Le musée devrait être construit sur les bords de la Saône
dans le neuvième, l'arrondissement de Gérard Collomb, le
nouveau maire qui voit d'un il bienveillant ce projet. " L'enveloppe
extérieure de ce lieu devrait être sobre. C'est le cur
de l'Organe qui pourrait surprendre " , laisse entendre le président
du groupe Serveur. L'un des défis consistera à matérialiser
le " Réseau des Réseaux ". Il est d'ores et déjà
prévu que l'architecte du bâtiment collabore avec "
l'architecte des réseaux ".
Coté financement, Thierry Ehrmann qui n'attend, ni ne souhaite
d'aides publiques, investira 95 millions de francs dans sa " petite
folie ". Et d'autres partenaires privés pourraient rapidement
s'associer. Rendez-vous dans une vingtaine de mois.
Jacques-Olivier MARTIN
copyright ©2001 Société française de photographie
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